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Chronique

Les Beckett, une grande famille sherbrookoise

15 octobre 2024

Alors que le hameau qui vient d’être renommé Sherbrooke ne compte qu’une cinquantaine d’habitants, un couple britannique originaire d’Upham, dans le comté d’Hampshire, fait son arrivée dans le village et s’y installe vers 1819, près de la rivière Magog. Dans cette maison, Henry Beckett et Caroline Bown ont leurs deux premiers enfants, Walter William et Ann, avant de déménager un peu en retrait des autres habitants, sur une terre qui devient leur première ferme. Situé sur le 2e rang du canton d’Orford, ce lot est témoin des débuts de l’histoire d’une grande famille de la région.

Dans les décennies qui suivent leur arrivée, Caroline et Henry ont au total onze enfants, chacun à deux ou trois ans d’écart, la dernière, Mary Amelia, étant née en 1847. Le couple fait éventuellement l’acquisition d’un autre lot un peu plus au nord, le futur Bois Beckett, et c’est sur cette terre que la fratrie grandit. Si Jane Louisa et Elizabeth restent célibataires, les autres se marient et plus d’une vingtaine d’enfants naissent de ces unions, agrandissant d’autant plus une famille déjà nombreuse.

Patriarche d’une imposante maisonnée, Henry Beckett ne se contente pas d’être agriculteur; maçon de métier, il ouvre une briqueterie en 1823 et laisse sa marque sur sa terre d’accueil grâce aux briques qu’il fournit pour la construction de nombreux bâtiments, dont l’un des pavillons de l’Université Bishop’s et la première prison de Sherbrooke. Il fait également partie de la milice jusqu’en 1853, où il y est nommé major en 1845, et s’implique aussi dans la politique locale au cours des années 1840.

Dans la lignée de leur père, les fils Beckett suivent ses traces et sont très impliqués dans la vie entrepreneuriale. Walter William, l’aîné, est un marchand général et un homme d’affaires très actif à Sherbrooke. Son frère, Charles Goodhue, qui a aussi un esprit d’entrepreneur, s’associe avec lui et fonde la compagnie C.G. Beckett & Co., une manufacture d’allumettes qui connaît beaucoup de succès. De son côté, Henry Robert reprend la briqueterie de son père et acquiert éventuellement celle de la famille Cuzner, dont les briques servent notamment à la construction de l’usine Paton, en 1866. Il touche aussi à la politique municipale et devient conseiller de la ville dans les années 1870. Malheureusement, les trois frères voient leur chance tourner avec la crise économique des années 1880 et doivent déclarer faillite.

Le plus jeune des frères, Frederick James, a un succès plus durable, puisque c’est lui qui hérite de la ferme familiale au décès du Major en 1870, laquelle est dorénavant surnommée Maple Grove Farm. Si la moitié des 400 acres qui constituent le domaine est divisée entre ses sœurs, Frederick est tout de même celui qui gère l’entièreté de la ferme qui compte, durant les années 1870, une érablière, un verger et une laiterie, entre autres, en plus de pâturages et de champs pour l’élevage et l’agriculture. L’essor que prend la ferme sous le plus jeune fils d’Henry Beckett et son épouse, Elizabeth Jemina Bonnallie, est conséquent, et ce, bien que l’entreprise reste familiale, ce qui est rendu possible grâce à l’aide apportée par leurs dix enfants. C’est d’ailleurs leur second fils, Frank George, qui poursuit les activités au décès de son père, en 1922, jusqu’en 1954, année de son propre décès.

Cecilia, la sœur de Frank George, est la dernière héritière des terres qui constituent aujourd’hui le Bois Beckett. En 1963, elle vend la propriété à la Ville de Sherbrooke, mais continue d’habiter la maison familiale, The Willows, nommée ainsi à cause de l’allée des Saules qui y mène, avant de quitter à la fin des années 1960. Pour ce qui est des autres descendants de Henry Beckett et Caroline Bown, il est difficile de connaître leur sort. Bon nombre de leurs enfants et petits-enfants ont quitté Sherbrooke au fil des ans pour d’autres provinces canadiennes ou pour les États-Unis, et le patronyme s’est également effacé chez les descendantes féminines avec les mariages, ce qui fait en sorte qu’il est plus complexe de les retracer. Une chose reste cependant certaine : les Beckett ont été une grande famille pionnière de Sherbrooke, et leur nom restera gravé dans l’histoire de la ville pour leur implication et leur importance à travers les générations.

Photo 1 : Véritables pionniers, le Major Henry Beckett et sa femme Caroline font partie des premières familles de Sherbrooke. C’est d’ailleurs M. Beckett qui effectue le tout premier recensement du village en 1819, où on compte 53 personnes pour une dizaine de familles. Fonds du Regroupement Bois Beckett Inc.

Photo 2 : Portrait d’Adeline, la deuxième enfant Beckett à épouser un membre de la fratrie Walker, John, dont le père, William Walker, est forgeron au village. Son frère Walter William avait épousé en premières noces Margaret Walker, et sa sœur Caroline s’unira à Edmund Walker par la suite. Fonds Léonidas Bachand.

Photo 3 : Portrait de Frederick James, le dixième enfant Beckett. Bien que les quatre fils du Major Beckett suivent les traces de leur père chacun à leur façon, Frederick est le seul qui embrasse véritablement le métier d’agriculteur. Pour cette raison, c’est lui qui reçoit la propriété familiale en héritage et qui exploite la terre avec ardeur, aidé de sa descendance presque aussi nombreuse que sa fratrie. Fonds Léonidas Bachand.

Photo 4 : Rosanna Beckett et son frère Frederick James ayant tous les deux épousé des membres de la fratrie Bonnallie, respectivement William et Elizabeth Jemina, les deux familles sont restées proches. Sur la photo, des femmes de celles-ci sont réunies pour un anniversaire, et on peut avancer que la première à gauche est Rosanna et que la deuxième à droite est Elizabeth Jemina. Collection Mme John Henry Taylor.

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